Quatre nouveaux
“Cabus“
La collection “Jazz Masters Cabu“ vient
de s’enrichir de quatre nouvelles références,
quatre merveilles de concision, de densité,
d’intelligence, de présentation… Comme
d’habitude !
GIL
EVANS.
Une anthologie 1946/1957.
Cabu 545 (sélection et texte de Christian Bonnet).
Vous trouverez facilement les deux Miles Davis et le
Parker. Les Helen Merrill (LP puis CD
Dream Of You),
Le Hal McKusick Jazz Workshop (sur le catalogue Fresh
Sound), Le Teddy Charles Tentet, les trois Marcy
Lutes (CD
Debut
en import japonais), la séance
Gil Evans & Ten
sont également disponibles, de même que la
totalité des Claude Thornhill (disséminés sur
plusieurs CD, l’essentiel figurant sur un Fresh
Sound)… Mais trouver tout cela ici va vous
économiser beaucoup de temps et d’argent. Cette
anthologie a un autre mérite, encore plus important,
elle comprend nombre de faces qui n’étaient
plus trouvables en dehors du marché de
l’occasion : Le Johnny Mathis (qui
figuraient récemment sur
Two Classic Album),
le Lucy Reed (This
Is Lucy Reed),
Les Don Elliott et, surtout, le
New Bottle Old Wine
de Gil Evans ! Cet enregistrement d’Evans,
son deuxième publié sous son nom, est une pièce
maîtresse de la carrière de l’arrangeur (et
aussi du saxophoniste Cannonball Adderley, principal
soliste). C’est pourquoi je regrette que,
contrairement à ce qui avait été fait dans
d’autres albums de la collection, l’on
n’ait pas inclus la totalité du disque
original. C’est d’autant plus regrettable
qu’il ne manque qu’un seul titre, moins
de sept minutes… L’arrangement si
original de
Bird Feathers
(avec ses magnifiques ensembles de trombone), les
solos de Cannonball (sept chorus, puis trois autres
sur la fin), Frank Rehak, Johnny Coles, Art Blakey et
Paul Chambers auraient dû conclure en beauté, et en
blues.
BARNEY
KESSEL.
Une anthologie 1953-1958.
Cabu 546 (sélection et texte de Claude Carrière).
Bravo à Claude Carrière pour avoir fait une toute
petite entorse à la chronologie en ouvrant cette
anthologie avec
Salute To Charlie
Christian,
soulignant par là non seulement les racines de Kessel
mais aussi, peut-être, la constance d’une
musique résolument à l’écart des modes.
Je me souviens d’un guitariste célèbre qui
trouvait le jeu de Kessel conformiste. « Trop de
phrases toutes faites », disait-il… Il
est vrai que Kessel utilisait volontiers quantité de
tournures usuelles mais, ce que ses détracteurs
oublient de dire, c’est qu’il les
utilisait comme des éléments totalement fondus dans
des développements personnels toujours parfaitement
clairs et logiques. Et c’est sans doute ce qui
agaça aussi, la « clarté », la
« logique », la simplicité apparente, à une
époque où la musique, et singulièrement la guitare,
s’exprimait chaque jour davantage avec
complexité, voire confusion… Quelle que soit
votre sensibilité aux questions de style, il y a
constamment dans la musique de Kessel deux autres
qualités essentielles qui devraient faire
l’unanimité des amateurs de jazz, le swing et
le sens du blues. Vous ne trouverez pas ici une seule
interprétation pour les démentir ou même seulement
les mettre en question.
JAZZ
MESSENGERS.
Une anthologie 1954-1958.
Cabu 547 (sélection et texte de Claude Carrière).
De
Doodlin’
et
The Preacher
à
Moanin’,
Along Came Betty
et
Blues March,
voilà quelques unes des pages les plus populaires de
l’histoire du jazz. Très didactique, avec un
premier CD entièrement consacré à la période Horace
Silver des Jazz Messengers, ce double album est idéal
pour les débutants. Pour les autres, c’est du
pur plaisir !
Guy Chauvier
LESTER
YOUNG.
The complete clarinet Works
1938-1958.
Cabu 548. Un manque chez les collectionneurs, cette
intégrale de Lester à la clarinette. Bien sûr,
beaucoup y ont pensé, certains se sont fait des
cassettes. Mais c'est Christian Bonnet qui a
concrétisé ; une fois de plus : merci Christian. Pas
de surprise : Un max de chefs-d'oeuvre. Quel
enchantement de redécouvrir des merveilles que l'on
avait écoutées il y a parfois trop longtemps.
Que dire d'originalement dithyrambique à propos de
l'orchestre Basie ou des KC Six ? De même qu'au sax
ténor, qu'est-ce qu'il a pris à Lester de souffler de
la sorte dans cet instrument pour lequel les
références de sonorités étaient depuis longtemps bien
établies, surtout pour un musicien du sud ?
L'influence de Lester à la clarinette est
complémentaire de celle qu'il a eu au ténor : alors
que la “clar“ avait été délaissée par les
boppers, de nombreux saxophonistes "cool" ont suivi
Lester : Art Pepper, Zoot Sims, Al Cohn, pour aboutir
à l'extrême du souffle avant la disparition de la
note : Jimmy Giuffre. L'on ne regrettera même
pas les 4 dernières faces (57, 58) où Lester semble
déjà bien fatigué. Il reste tellement d'émotion qu'il
nous semble souffler son âme à travers l'instrument,
conscient depuis longtemps que la réserve s'épuise...
Marc Richard