Selmer 607

Selmer 607
Studio LDC 0801 / Cristal Records 0825. Swing 48 - Made In France - What A Wonderful World - Vette - Natacha - Impressions - Polkadots And Moonbeams - Nanatango - Viper’s Dream - Evan’s Hair - Billets doux - Stella By Starlight - Topsy - Rue du Languedoc - Insensiblement - Instants volés. Durée : 58’11. Distribution Abeille Musique. Vente en ligne sur abeillemusique.com, cristalrecords.com, Amazon, Fnac...

Cinq jeunes guitaristes dans le vent et une vénérable dame de 63 ans se partagent la vedette de ce disque. Les cinq jeunes gens appartiennent à la grande famille de la guitare manouche dernière génération. Adrien Moignard, Rocky Gresset, Sébastien Giniaux, Richard Manetti et Noé Reinhardt, dont le talent n’est plus à confirmer, s’inscrivent dans une tradition qu’ils transcendent, ne se référant plus à un modèle unique (Django) et s’autorisant des voyages musicaux que nul n’oserait leur reprocher... La vieille dame, elle, a eu droit à un lifting. Cette Selmer authentique et rare (le modèle 607 a été fabriqué en 1946), très proche de la 503 que possédait Django Reinhardt, sonne, au dire des cinq musiciens, d’une manière unique. Et il n’est pas besoin d’être guitariste manouche pour goûter la richesse du timbre, le dynamisme de chaque note, la beauté des accords. Le son à lui seul est une aventure. Chaque jeune guitariste a droit à trois morceaux en leader, accompagné d’un membre de cette phalange ou d’un invité (Benoît Convert, Nicolas Blampain à la guitare ; Guillaume Singer au violon), épaulé par une rythmique commune (Jérémie Arranger à la contrebasse ; David Gastine et Ghali Hadefi aux guitares rythmiques, ce dernier également producteur du disque). Chacun joue un titre du répertoire de Django et laisse ses goûts et, parfois, son talent de compositeur, compléter son programme. Rocky Gresset joue donc un Django et deux standards, trois atmosphères différentes que réunit un phrasé délicat toujours en quête de mélodie. Sébastien Giniaux semble se dire qu’une pareille occasion ne se reproduira pas de si tôt et profite bien de la Selmer, des graves aux aigus, essaie tout ce qu’une guitare manouche est capable de jouer. Adrien Moignard demande à la Selmer des titres qu’elle n’a sans doute pas souvent interprétés (What A Wonderful World et Impressions de Coltrane) ainsi qu’un Billet doux qu’il fait chanter comme personne. Richard Manetti débute avec une superbe composition, Natacha, se lance dans un tango tendu et maîtrisé, et un Topsy plus classique qu’il sait toutefois rendre personnel. Noé Reinhardt, enfin, est exemplaire pour la souplesse de son coup de poignet, le son chaleureux qu’il sort du précieux instrument dans Vette, pour un ultime Instants volés qui ressemble à une pure impro en compagnie de Rocky Gresset...
Voilà un vrai disque, avec un projet, une unité, un soin particulier adressé à l’enregistrement et au livret. Il y a même un site très intéressant (www.selmer607.fr). C’est aussi - et surtout - une manière subtile de découvrir ces jeunes musiciens.

Dominique Périchon
(Jazz Classique n°54)